Se secourir est l'un des deux droits humains les plus absolus

Les fokonolona peuvent et doivent le faire sans quémander ni attendre l'autorisation de personne.

 


Bonjour Julien (Rakotoarimanana)

(Julien est un journaliste malgache de Madagascar (sous le pseudonyme Dadazily) et consultant à Antananarivo).

 

Tu as dit dans ton message du 08 décembre 2009 :

"Les fokonolona sont bien réels mais c'est nous les intellectuels qui patinons en cherchant à nous mettre au même diapason qu'eux pour les appuyer à s'auto émanciper (peut-être le sens d'auto-secours prôné par Joseph)."

Bien sûr qu'il faut appuyer le peuple à s'auto émanciper, Julien. Mais s'auto secourir n'est pas s'auto émanciper.

Julien a déjà posé antérieurement la question si "auto-secours" ne relève pas d'un esprit égoïste.

Si Julien le clairvoyant se pose ces questions, c'est qu'il existe une importante zone d'ombre (voire d'obscurité) sur cette phase de notre projet (auto-secours du peuple par le peuple). Voir www.fokonolona-renove.org / Quatre grands pas à franchir / Deuxième grand pas.

 

L'auto-secours, c'est le secours de soi-même, c'est se secourir quand on est dans une situation de danger vital et que personne ne vient nous secourir. Il s'agit d'un droit absolu, du droit humain n°1, c'est-à-dire un droit au-dessus de tous les droits, un droit inaliénable même s'il n'est inscrit nulle part. À ce droit imprescriptible s'ajoute d'ailleurs une loi complémentaire, aussi sacrée : le devoir absolu pour tout être humain d'assistance à une personne en danger vital. C'est le droit humain absolu n°2.

Se secourir n'est pas s'émanciper, Julien. Quand un individu est en train de voler une pomme parce qu'il a faim et qu'il n'a plus rien à manger, il ne s'émancipe pas, il cherche de quoi mettre sous la dent pour ne pas crever de faim.

 

Deux questions doivent donc nous tarauder, les Malgaches et les ami-e-s du peuple de Madagascar :

Le peuple malgache est-il en danger vital ? - Pour les 20% affamé-e-s, certainement. Pour les 80% dénutri-e-s, oui aussi, sans hésitation, et Célestin (un autre Malgache) l'a bien rappelé dans un de ses messages. La dénutrition massive chronique, permanente, détruit non seulement les muscles, mais surtout les cellules nerveuses, c'est-à-dire tous les outils vitaux (biologiques) qui nous permettent de survivre, de mieux vivre et de nos émanciper.

La deuxième question : Y a-t-il un ou des sauveurs qui viennent secourir ces affamé-e-s et ces dénutri-e-s malgaches ? - Non, à part les ONG malgaches et étrangères qui n'apportent que des gouttes d'eau dans un Sahara de misères.

Tout système politique, économique et social qui ne commence pas par supprimer la faim et la dénutrition tue forcément des millions d'êtres humains, le peuple dont ils font partie avec. C'est incontestablement le cas pour tous les régimes successifs, sans exception depuis plus d'un siècle, à Madagascar.

 

Dans notre projet Fokonolona rénové, la phase d'auto-secours par l'outil Fokonolona constitue donc une phase primordiale et nécessaire, incontournable. Surtout si nous voulons vraiment que tous les Malgaches puissent s'émanciper et assurer à plein leur rôle de citoyens et citoyennes responsables d'eux-mêmes, de leurs familles, de leurs cités, de leur pays, et co-responsables à égalité de la planète Terre.

 

Joseph

 

Voici le message de Julien :

091208

 

Bonjour Bekoto, Joseph et à vous toutes et tous qui sont intéressés par la question du Fokonolona,

 

Des fois, je me perds aussi alors que j'ai cru comprendre depuis le début de quoi il s'agit. C'est dans le qualificatif "rénové" que réside le problème à mon avis. Car toujours à mon avis, il ne s'agit pas de "restructurer une nouvelle définition du Fokonolona". Les fokonolona sont bien réels mais c'est nous les intellectuels qui patinons en cherchant à nous mettre au même diapason qu'eux pour les appuyer à s'auto émanciper (peut-être le sens d'auto-secours prôné par Joseph).

 

Donc, il s'agirait de concevoir et de mettre en place les règles qui permettraient de leur faire jouer pleinement leur rôle. Et c'est là que je comprends l'ambition écourtée de Ratsimandrava (un taranak'andevo comme "nous") Il fut en passe en tant que Chef de l'Etat de faire réaliser le rêve des "madinika" par l'institutionnalisation des Fokonolona. Et on l'a abattu. A qui a profité le crime, comme vient de dire le Dee Jay honni des pseudo bien pensants.

 

Il y a aussi un bouquin intéressant sur les Fokonolona édité par l'ORSTOM en 1995 : Chair de la terre, oeil de l'eau ... Paysanneries et recomposition des campagnes en Imerina (Madagascar) par Hervé Rakoto Ramiarantsoa. C'est du historico-pratique ce bouquin, et c'est un gars d'Attac qui me l'a offert. Je le recommande.

 

Un de ses sites étudiés est le village de Mangarano, dans la commune d'Ambatomanga. C'est dans ce village qu'est situé mon tombeau familial. Je ne connais pas Monsieur Hervé Rakoto Ramiarantsoa. D'après son étude, c'est un village qui existait bien avant l'accession d'Andianampoinimerina au pouvoir, et mes ancêtres paternels ont régné là-bas. Le dernier fut la honte de la famille, car il s'est enrôlé comme gradé (caporal) dans les gardes indigènes et a maté la rébellion. Mais c'est mon grand-père, si honni soit-il, et même si mon père fut obligé d'écourter ses études et fuire le village en désaccord avec son père, je le respecte. Il a laissé son cahier de mémoires, un journal de son vécu comme chef de poste de la gendarmerie d'Ambatomanga. Je retrouverai ce cahier (que j'ai déja lu) et peut-être que je le publierai.

 

Pour moi, c'est cela la vérité préalable à la réconciliation. Et pour que mon père et son père puissent reposer en paix pour l'éternité côte à côte dans notre tombeau. Je les rejoindrais peut-être, mais jusqu'à présent, c'est le cimetière des étrangers d'Andraisoro qui me convient.

 

Dadazily

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