Usurpation du Fihavanana malagasy‏.‏‏

Le Fihavanana usurpé n'est pas le Fihavanana.

Le Fokonolona rénové rétablira

le Fihavanana malagasy.

Bonjour Nirina (Milijaona) et Jean (Gennesseaux)

Vous m'avez envoyé, sans probablement vous connaître, et presque en même temps cet écrit de L. Denis Alexandre titré :

"Fihavanana, anti-démocratique".

Pour mes correspondant-e-s non malgaches, le "fihavanana" est une vertu populaire spécifiquement malgache. Il s'agit dans les faits d'une concorde sociale estimée par les Malgaches comme naturelle et universelle. C'est-à-dire qui prime ou doit primer sur tous les conflits entre individus, entre classes sociales, entre ethnies, entre peuples.  

Je n'entre donc pas dans la polémique sur l'origine de cette vertu populaire. J'insiste par contre sur sa détérioration profonde actuelle.

Denis Alexandre a en partie raison en faisant remarquer qu'actuellement, l'application du "fihavanana" mène ou mènerait au népotisme politico-sociétal et au laxisme juridique. Des faits paraissent le prouver.

Mais l'auteur n'a pas précisé qu'il s'agit dans tous ces cas d'usurpation du mot "fihavanana" pour satisfaire des intérêts claniques - et non universels -. Il s'agit du détournement caractérisé d'une vertu et d'un acquis culturel populaire, détournement propre à tous les régimes pyramidaux.

Car le Fihavanana malagasy est une vertu populaire horizontale car fondée sur le toi-et-moi horizontal, solidaire et universel. Il a cimenté l'unité nationale malgache entre les dix-huit à vingt ethnies qui vivent sur la Grande Île. Il fonde l'hospitalité proverbiale du peuple malgache. Il ne pourra plus se restituer et se réaliser correctement que dans unsystème sociétal et social horizontal.

Le "fihavanana" se conjuguait à merveille avec le "fokonolona", une institution malgache justement horizontale. C'est-à-dire une institution au sein de laquelle tous les habitant-e-s majeur-e-s du territoire de ce fokonolona sont à égalité de dignité, de droits, de pouvoirs et de libertés. C'est une institution de démocratie directe de proximité, souveraine dans ses décisions (dina) sur pratiquement tous les problèmes locaux, dans le territoire du fokonolona (fokontany) et entre les fokonolona voisins. Le Fihavanana était La Loi dans le fokonolona et entre les fokonolona. Le népotisme et les passe droit juridiques étaient ignorés car impossibles.

Le régime colonial, pyramidal, a instrumentalisé le Fokonolona pour imposer la domination-prédation coloniale. Les régimes dits "indépendants" depuis 1960, toujours pyramidaux, ont continué cette instrumentalisation du Fokonolona. Dans une telle pyramidalisation permanente des relations interhumaines, flanquée d'une clanisation profonde des classes politiques, le Fihavanana n'a plus de sens. L'évoquer ne peut apporter que frustrations et amertumes.  

Pour tromper le peuple qui, lui, garde une nostalgie profonde et légitime du Fihavanana, des homoreptiliens (1) osent utiliser ce mot à Madagascar pour "justifier" leurs manœuvres de domination-prédation sur le peuple.

Le projet Fokonolona rénové (voir www.fokonolona-renove.org ) a comme objectif premier de rétablir le Fihavanana par une triple action constructrice en boucles permanentes dans une nouvelle méthode de fonctionnement des fokonolona : "miara-mitady, miara-manapaka, miara-mandroso" (chercher ensemble, décider ensemble, avancer ensemble). Ce Fihavanana rénové redonnera la confiance entre Malgaches, entre êtres humains, entre le peuple malgache et les autres peuples de la planète. Il installera le Fihavanana universel et durable.

Joseph (le militant infatigable pour le toi-et-moi horizontal, solidaire et universel)

(1) Homoreptiliens. Ce sont des êtres humains (homo) qui utilisent les moyens ultra puissants de l'humain (cent milliards de neurones à la naissance) dans une logique et une mentalité junglières (reptiliennes) : le chacun pour soi, la liberté sauvage (sans aucune responsabilité ni sociale, ni d'espèce, ni environnementale) ou libéralisme, la concurrence (frime, harcèlement, recherche permanente de la domination et de la prédation sur les autres congénères, menace, provocation, affrontement concurrentiel armé ou non …), une société pyramidale en conséquence ou hiérarchie entre congénères, la répression permanente (division, répression, prédation, corruption) pour maintenir la pyramide junglière, la non assistance à congénère en danger ou en difficulté vitale, et le conformisme aux lois de la jungle).

 

Voici le texte intégral de Denis Alexandre :      

12 juin 2010

Fihavanana, anti-démocratique

Écrit par L. Denis Alexandre

Le temps est au changement. Rénover la République, la doter d’une nouvelle Constitution, moraliser les pratiques politiques… les passeurs vers la IVème République ont fort à faire. Dans leur difficile mission, ils font appel à toutes les bonnes volontés qui peuvent leur offrir des projets dans ce sens. Et comme en 1991, les propositions ne manquent pas dont bon nombre s’inspirent des valeurs traditionnelles malgaches. En cette période de crise, rien d’anormal à ce qu’on se tourne vers le passé, considéré comme un Age d’or. Dans ce registre, nombreux pensent que la future Constitution doit se poser sur le socle du « Fihavanana ». S’il est encore difficile de définir ce concept d’une manière claire et sans ambigüité, on s’accorde à le considérer comme importante dans la société malgache. Et pour cause, il est synonyme de paix et de concorde. Un universitaire a un jour annoncé que le « Fihavanana vient du non-Fihavanana ». Dans son argumentaire, il croît que ce principe n’est pas utile là où il y a déjà un lien de parenté. C’est entre deux personnes, deux groupes, deux régions, deux pays, qui n’ont aucun lien que le « Fihavanana » intervient. C’est dans ce cas-là qu’il devient une valeur importante en tant que ciment permettant de consolider les hommes dans une même nation. Le « Fihavanana » est donc une valeur jugée largement positive. Mais seulement quand il agit sur les relations interpersonnelles et intergroupes (régionales, ethniques…). Par contre, il devient dangereux quand on s’y réfère en tant que valeur politique. Au nom du « Fihavanana », l’Etat devient néo-patrimonial, au sens où l’entend Jean-François Médard qui a emprunté une notion chère à Max Weber. En terme plus profane, le « Fihavanana » rend un homme politique tributaire de sa famille, de son ethnie, de son appartenance sociale… Ainsi, quand celui-ci accède dans les hautes sphères de l’Etat, il est obligé de rétribuer ses attachements sociaux et bonjour népotisme, favoritisme, corruption et tous les vices qu’on reproche aux anciennes Républiques. Appliquer à la Justice le « Fihavanana » peut être encore plus ravageur. En son nom, le droit n’est plus dit et la justice est bafouée. On ne peut plus condamner un allié, un proche ou encore un des membres de son ethnie, de peur d’être rejeter par la communauté. Bref, en politique, le « Fihavanana » est une valeur à prendre avec des pincettes car il est également porteur d’un germe de mauvaise gouvernance et anti-démocratique. Le législateur doit en prendre conscience s’il veut instaurer une République qui dure. Toutes les valeurs du passé ne sont pas toujours porteuses d’avenir.

http://www.madamatin.com/articles/editorial/fihavanana-anti-democratique.html

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